Gel des financements accordés aux hôpitaux privés en 2024 :Chronique de la mort annoncée des Urgences et des Soins Critiques dans lePrivé ?
- kerajahlecho
- 17 avr. 2024
- 3 min de lecture

De nombreux établissements de santé privés ont, de longue date, opté pour
une stratégie de réponse globale aux besoins de santé de la population.
Ils proposent ainsi une offre de soins historiquement considérée comme
réservée au secteur public, montrant leur attachement à la participation globale dans
le système de santé français, loin des images reçues d’effecteurs de santé
exclusivement tournés vers les activités rentables.
Leur maillage territorial étendu est un rempart face au risque de désertification
de l’offre dans de nombreux départements. La qualité de leur intégration locale et de
leurs partenariats avec les structures publiques, sous la supervision des Agences
Régionales de Santé, est reconnue et incontournable. La crise de l’hôpital public se
traduit par une pénurie de praticiens dans différentes disciplines médicales ou
chirurgicales et la seule alternative devient le secteur privé y compris pour les
activités non réglées ?
Les services d’Urgences, les unités de Soins Intensifs ou de Réanimation
s’inscrivent évidemment dans ce cadre. Leur participation à la Permanence Des
Soins (PDSES) en atteste. Leur capacitaire et leur adaptabilité lors de la crise COVID
ont permis non seulement l’amortir le choc mais de minimiser la détérioration
temporaire de la réponse aux besoins globaux de santé.
Pour autant, les unités d’urgences des établissements privés à but lucratifs ne
cessent d’être fragilisées depuis lors :
- Modifications des grilles tarifaires des actes des praticiens libéraux
urgentistes, dévalorisant les forfaits 1 et 2, base classique de l’activité
libérale
- Instauration, à la demande des établissements publics devant la saturation
des services d’une notion de régulation,
- Différences notables de financement des activités entre les différents
effecteurs.
Cette évolution a eu comme conséquences :
- Une double désaffection pour l’exercice médical libéral aux Urgences
(diminution d’activité et modifications tarifaires), marginalement modifiée
par la Loi Rist. Cette dernière vise à interdire dumping salarial médical
effectué par certains établissements publics (Loi n° 2021-502 du 26 avril
2021)
- Une diminution des ressources des établissements par baisse des
dotations populationnelles attribuées aux établissements privés
(proportionnelles au nombre d’admissions) pouvant interroger sur des
nécessités d’adaptation des ressources humaine nécessaires

Ces éléments, aux conséquences économiques néfastes, ont pu être les
ferments d’une réflexion sur la pertinence du maintien, sous leur forme actuelle, de
leurs unités d’Urgences.
La dernière campagne tarifaire du 26 mars 2024 source de discriminations
évidentes est une réelle fragilisation supplémentaire et peut être celle de trop.
Portera t’elle le coup de grâce à l’existence de services d’urgence en
établissements privés ?
Les conséquences économiques de ces mesures sont sans appel : près des
trois quarts (73%) des services d’urgences des établissements privés seraient
déficitaires en 2024 dans un contexte ou 60% des cliniques pourraient l’être
également.
Une analyse superficielle conduisant à une réflexion sur la pertinence
économique de ces unités ne peut s’appliquer. Elle conduirait à des décisions
irréfléchies impactant gravement le fonctionnement global des établissements
détenteurs de tels services qui ont au fil du temps structuré ou développé leur
équilibre en intégrant les activités non réglées dans l’organisation de leurs soins.
De plus, les difficultés majeures rencontrées par les services d’Urgences des
établissements publiques les rendent incapables d’assurer le surcroit d’activité que
créerait la suppression de l’offre privée. Il est, par ailleurs, impossible de restreindre
encore les admissions aux urgences par un durcissement de la régulation effectuée
sans mettre en danger la santé de nos concitoyens.
Nous sommes donc à une période charnière qui, si aucune prise en compte
par les pouvoirs publics des difficultés actuelles, peut conduire à une régression de
l’offre de soins aux conséquences potentiellement graves au plan sanitaire et
économiquement inefficaces voire délétères.
Plusieurs alternatives ou adaptations de fonctionnement peuvent permettre la

persistance voire le développement de notre capacité d’accueil non programmé.
La flexibilité du système de santé privé, la souplesse et l’autonomie des
gestions délocalisées, rendent ces opportunités réalisables, si elles sont rapidement initiées.